
L’Africa Finance Corporation (AFC), principal fournisseur panafricain de solutions d’infrastructure, a finalisé la plus importante opération de financement de son histoire : un prêt syndiqué de environ 1,38 Md€ (1,5 Md$) sur trois ans, largement sursouscrit par un consortium de prêteurs internationaux. Initialement lancé à 1,3 Md$, le prêt a attiré une forte demande, intégrant de nouveaux participants tels que Bank of Communications, Burgan Bank, Export Development Bank of Egypt et Hua Nan Bank. Cette transaction consolide la position d’AFC comme référence du crédit africain et acteur central de la mobilisation de capitaux internationaux pour le continent.
Une opération record pour soutenir la croissance du bilan
Les fonds seront alloués à des besoins généraux de financement, au renforcement du bilan et au développement de nouveaux projets sur le continent. « C’est un financement à usage général, mais il s’inscrit pleinement dans notre ambition d’expansion », explique Banji Fehintola, Executive Board Member et Head of Financial Services. « Nous visons un bilan de 20 Md$ d’ici 2028, contre 14,4 Md$ fin 2024. » Le pool bancaire réunit un ensemble d’arrangeurs de premier plan : Abu Dhabi Commercial Bank, Commerzbank et Standard Chartered Bank en qualité de Global Coordinators et Initial Mandated Lead Arrangers & Bookrunners, aux côtés de Bank of China, First Abu Dhabi Bank, Mashreqbank, MUFG, FirstRand, State Bank of India, The Standard Bank of South Africa, Société Générale et Sumitomo Mitsui Banking Corporation. Standard Chartered Bank assure la documentation et First Abu Dhabi Bank agit comme facility agent. Selon nos informations, la transaction affiche un pricing environ dix points de base plus serré que la précédente facilité de 1,16 Md$ conclue en 2024. « Cette amélioration reflète la solidité de notre signature et l’intensification de notre dialogue avec les investisseurs », souligne Fehintola.
Un pipeline stratégique de plusieurs milliards et une logique d’industrialisation
Selon nos informations, les ressources soutiendront un pipeline d’investissements couvrant l’énergie, les ressources naturelles, la logistique, l’industrie lourde et les télécommunications. Parmi les projets phares figure le corridor Lobito, infrastructure ferroviaire transfrontalière reliant l’Angola, la Zambie et la RDC à l’océan Atlantique. « Nous construisons 830 km de voie neuve et réhabilitons 1 500 km supplémentaires », précise Banji Fehintola. « Le transport des minerais passera de 45 jours à une semaine : un changement de paradigme logistique. » AFC y a déjà engagé 500 M$, avec pour objectif d’y associer capitaux africains et investisseurs internationaux. Dans l’énergie, AFC, désormais premier propriétaire africain d’actifs renouvelables, développe, via sa plateforme Lakela, un portefeuille visant 10 GW de capacités installées. Parallèlement, l’institution appuie la montée en puissance de champions industriels africains comme Arise Group, présent dans une quinzaine de pays après une première implantation au Gabon. « Notre mission est d’aider l’Afrique à s’industrialiser », résume l'expert. « Il faut rompre avec le modèle d’exportation brute pour créer de la valeur localement. » Le numérique complète cette stratégie : AFC étudie plusieurs projets de data centers en Afrique du Sud, Égypte et Angola, où elle explore la valorisation d’énergies excédentaires pour alimenter ces infrastructures à forte intensité énergétique.
Un marché du crédit africain en reprise et un rôle de catalyseur
La transaction intervient dans un contexte de resserrement des spreads africains et de retour de l’appétit pour le risque émergent. « Les spreads se sont réduits jusqu’à 200 points de base pour certaines signatures souveraines », observe le Head of Financial Services. « Les investisseurs veulent de l’exposition à des crédits solides, et AFC coche toutes les cases. » L’institution bénéficie de sa notation A3/stable : l’une des plus élevées du continent, et d’une stratégie proactive d’engagement avec les marchés, via ses AFC Days organisés à Londres, Dubaï, Pékin, Shanghai, Tokyo, New York... Cette visibilité a favorisé la sur-souscription de l’opération et l’élargissement de la base de prêteurs, notamment en Asie et au Moyen-Orient. En 2025, AFC a également levé une facilité durable de 937,5 M AED (environ 240 M$) auprès d’institutions émiriennes. Au-delà de son propre financement, AFC agit comme catalyseur pour la liquidité africaine. « Chaque transaction de cette ampleur envoie un signal fort au marché », souligne Banji Fehintola. « Lorsque certains investisseurs ne peuvent pas participer à notre prêt, ils se tournent vers d’autres opportunités sur le continent. » Plusieurs émetteurs africains ont déjà repris leurs discussions de refinancement, portés par cette dynamique. AFC facilite également l’accès des emprunteurs africains aux marchés internationaux via des garanties de crédit adossées à sa propre signature.
Vers de nouvelles émissions internationales
L’institution structure son financement autour de trois volets : prêts syndiqués pour les maturités courtes, financements multilatéraux pour le long terme (10 à 20 ans) et émissions de marché pour les maturités intermédiaires. « Le marché obligataire redevient attractif. L’Eurobond reste une option viable, mais nous explorons aussi des marchés non-traditionnels », confie Fehintola. Selon nos informations, AFC envisage une diversification accrue : émissions en yuan sur le marché des Panda Bonds en Chine, en yens sur le marché des Samurai Bonds au Japon, ainsi que des placements à Taïwan et dans le monde islamique après le succès d’un premier Sukuk. Depuis sa création en 2007, AFC a investi plus de 15 Md $ dans 36 pays et compte 46 États membres. En mobilisant des capitaux privés à grande échelle, l’institution s’impose comme un instrument clé de la souveraineté financière et de l’industrialisation du continent.